jeudi 30 janvier 2014

Le débat "Mademoiselle"

« Mademoiselle ou Madame ? »
« Mademoiselle ! » répondront certain-es. « Madame ! » répliqueront d’autres.
Ou pourquoi cette victoire que certains jugent inutile (qui a dit que je suis en retard ?).

Jusqu’à une certaine date, sur les papiers officiels, vous pouviez, mesdames, cocher soit « Madame » soit « Mademoiselle ». De même, en public, selon votre situation ou l’âge que l’on pouvait vous donner, on vous nommait l’un ou l’autre.
Mais selon quelle situation, exactement ? Eh bien, tout dépend de certains critères. Ainsi, les femmes mariées/divorcées/pacsées avaient droit à « Madame ». Mais alors, certaines femmes, qui avait décidé de ne jamais se marier ni se pacser auraient dû s’appeler mademoiselle jusqu’à la fin de leurs jours ? Eh bien, pas forcément. A partir de l’âge que votre interlocuteur peut vous donner, vous pouviez écoper, mariée ou non, de « mademoiselle » ou « madame ». Bien que sur les papiers officiels, vous risquiez « Mademoiselle ».
Quel que soit le papier, vous n’y échappiez pas. On vous demandait ainsi, sournoisement, si vous étiez casée officiellement (j’entends pas là suite à un contrat) ou pas. Ce qu’on ne demande pas forcément aux hommes, qui se contentent de « Monsieur ».

Comment « mademoiselle » est-il entré dans la législation française ? Eh bien, suite au « Code Napoléon », au XIXe siècle. Abrogé, il a ensuite perdu toute valeur légale en France et aucun règlement n’était censé imposer cette civilité.
Mais tout ne se passe pas comme prévu puisque beaucoup d’administrations continuaient à l’utiliser, telles que les impôts.
Mais qu’est-ce qu’au juste le Code Napoléon ?
C’est une merveilleuse catastrophe qui affirmait l’incapacité juridique totale de la femme mariée (et mineure, évidemment). Dont :
- l’interdiction d’accès aux lycées et Universités
- interdiction de signer un contrat et gérer ses biens
- exclusion totale des droits politiques
- interdiction de travailler sans l’autorisation du mari
- interdiction de toucher soi-même son salaire
- contrôle du mari sur la correspondance et les relations
- interdiction de voyager à l’étranger sans l’autorisation du mari
- répression très dure de l’adultère pour les femmes
- les filles-mères et les enfants naturels sans droit
Et Napoléon en rajoute une couche, le mignon petit garçon, en déclarant qui sont les personnes privées de droits juridiques : les mineurs, les criminels, les débiles mentaux et… les femmes mariées !
A ce monument de bêtises, il ajoute que le « devoir conjugal » est une obligation : il n’existe donc plus de viols conjugaux. La femme et ses entrailles deviennent la propriété de l’homme.
Puis, en 1916 : l’interdiction de divorcer !
Eh, on a le droit de respirer, au moins ?
Merci, Napoléon !
Je suis quasiment sûre que les fœtus de maintenant, avec leur barda sur l’IVG, ont plus de droits que les femmes à cette époque-là. Sérieusement.

Rapport au Code Napoléon, ce bijou de perfection, pour un certain nombre de femme, ce terme de « mademoiselle » les renvois à une époque où, éternelles mineures, elles « gagnaient » le titre de « madame » en passant de la tutelle du père à celle du mari.
La civilité « mademoiselle » a donc été supprimé suite aux demandes des militant-es d’Osez le féminisme et Chiennes de Garde, par notre ex-Premier Ministre François Fillon. Pourquoi, à part pour son origine ? Parce que, selon eux/elles, c’est une discrimination à l’encontre des femmes, ainsi contraintes de faire part de leur situation matrimoniale, donc.
Auparavant, les femmes devaient préciser quelle appellation convenait partout : dans les formulaires ; pour les impôts, pour les abonner à une ligne téléphonique, lors d’un sondage, pour une carte de fidélité… Quel intérêt à demander cela, à part à les forcer à dévoiler cette partie de leur vie privée ?
Il faut savoir que beaucoup de pays ont déjà abandonné ce terme. Au Canada, par exemple, « mademoiselle » est considéré comme une insulte. En Espagne, en Allemagne, ce sont des marques de politesse. Au Danemark ? Il est interdit de s’en servir !
Faut-il arrêter de désigner des personnes ainsi ? Personnellement, je pense que pour une jeune femme, mineure, cela passe encore. Mais dès la majorité, je préfère le terme de « Madame ». Cela dépend, je suppose, des personnes.

Anti-mademoiselle
Beaucoup pensent que c’est une victoire faussée, d’autre se plaignent. Leurs raisons ?
- « Contrairement à ce que diraient les féministes, c’est flatteur. »
Chacun son point de vue. Sans doute que les femmes jamais mariées n’apprécieraient pas d’être appelé « mademoiselle » à 75 balais. Tout comme une toute jeune femme mariée apprécierait peu qu’on la dénomme ainsi. Un « mademoiselle » pour untelle, un « madame » pour telle autre, alors qu’elles ont toutes deux le même âge…
- « Madame n’est pas plus élogieux que Mademoiselle, car à l’époque où  ils étaient le plus usités, quand cette hystérique de Fâme n’avait pas encore le droit de vote et de faire ce qui lui plaît (ou presque), Madame signifiait simplement qu’on passait de la tutelle du père à celle du mari. »
Certes. Mademoiselle signifiait alors plus ou moins « célibataire ». Mais maintenant, beaucoup de personnes ne se marient pas sans être pour autant célibataires.
- « Il y a des choses plus urgentes » - dit même par des féministes. C’est ce que confirme le sondage Ifop lancé par l’association Paroles de femmes. En effet, « il n'était jugé important que par 5% des sondées contre 84% pour l'égalité salariale…», selon la Présidente Olivia Cattan.
Cependant, je pense, comme d’autres, que tous les combats sont importants. Chaque victoire, même infime, nous rapproche de l’égalité.

Quels sont, selon les féministes se sentant concernés, les arguments en défaveur de la civilité « mademoiselle » ? Premièrement, que cette précision ne soit demandée qu’aux femmes. En effet, pas de case « damoiseau » à disposition des messieurs. 
Cette civilité induirait également une intrusion dans la vie privée. Cela oblige la femme à exposer une situation personnelle et familiale : « bout de viande disponible ou pas ? ». Il permettrait aux hommes de déceler une disponibilité sexuelle potentielle, du fait de son association récurrente avec « célibataire », à une époque où les mariages ne sont plus si systématiques que cela, ni immédiats. Cela encouragerait donc la drague, le harcèlement
C’est aussi vexant. Cela sous-entendait qu’une femme n’est pas finie et n’a donc pas droit au respectable « madame » tant qu’elle n’est pas mariée.
« Mademoiselle » vient d’ailleurs d’oiselle, qui signifie oie blanche, pucelle au Moyen-Âge. A une époque où les relations sexuelles n’attendent plus l’union officielle, c’est un peu étrange.

Beaucoup de femmes disent qu’elles « se sentent insultées d’être appelées, aussi jeunes, madame ». Prenez donc ça comme du respect. Cela ne dit rien sur votre âge ! Appelle-t-on les jeunes hommes non mariés « mon damoiseau » ?

Désormais, seulement deux choix devraient se proposer à vous sur les formulaires administratifs : « madame » ou « monsieur ».
Dans la même optique, « nom de jeune fille » et « nom d’épouse » devraient être remplacés par « nom d’usage » pour ne pas préjuger du statut marital, car ces expressions ne convenaient pas aux personnes veuves et divorcées désirant garder le nom de leur conjoint.
Pour info, sachez que vous pouvez désormais prendre le nom de votre mari en plus du vôtre, que votre mari peut prendre le vôtre, et qu’enfin vous pouvez donner le ou les noms de votre choix à vos enfants.

[je rappelle que même si je donne mon avis, je ne méprise pas ceux qui en ont un différent. Posez ces pierres et ne procédez pas à cette lapidation dont vous rêvez, svp]

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire